Nini dans le Jardin (Nini Lopez), 1875–6 ; Renoir

Huile sur toile, 61.9 x 50.8 cm

The Metropolitan Museum of Art, New York ; The Walter H. and Leonore Annenberg Collection

 

Le modèle de Renoir, Nini Lopez, est assis dans le grand jardin adjacent à son atelier de Montmartre au 12 rue Cortot. La technique de l’artiste – des touches variées de couleurs mélangées grossièrement avec du blanc – et son intérêt dans la lumière tachetée et les ombres violettes sont les mêmes que ceux de son chef-d’œuvre de cette période, le  Moulin de la Galette (1876, Musée d’Orsay, Paris). "[Renoir] a rarement traité une seule toile à la fois, et Nini dans le Jardin, signé mais on daté, appartient à la période située juste avant le Moulin de la Galette. Inspiré par le travail de Monet à Argenteuil, Renoir a expérimenté depuis le début des années 1870 le thème des jeunes femmes dans un jardin ; en taille, format, et orientation, Nini dans le Jardin peut être rattaché à la Femme au Chien Noir de 1874 et au rayonnant Femme à l’Ombrelle de 1878. Ces tableaux sont identiques dans leur taille (61 x 51 cm) ; chacun explore le problème d’intégrer le personnage féminin vêtu dans la lumière du jour ambiante et d’arriver à une harmonie entre la Parisienne élégante et la nature exubérante. Encore apparenté de plus de près est la Jeune Fille sur la Plage, qui a été probablement peint lors d’une même séance : là-bas, le modèle, Nini Lopez, est assis sur une chaise de jardin similaire et porte la même robe, mais sa présence est plus assurée, en étant l’élément principal de la composition. Les deux tableaux transmettent le plaisir que Renoir éprouve dans le grand jardin de la rue Cortot. George Rivière, qui a accompagné Renoir dans sa recherche pour l’atelier idéal de Montmartre, rappelle qu’ « aussitôt que Renoir est entré la maison, il a été charmé par la vue de ce jardin, qui avait l’air d’un beau parc abandonné. Une fois que nous avons eu passé le couloir étroit, nous nous sommes trouvés devant une vaste pelouse inculte ponctuée de pavots, de liserons, et de pâquerettes. » « Au delà de ceci », Rivière continue, « se trouvait une belle allée plantée d’arbres sur toute la longueur du jardin – c’est la vue que Renoir a utilisée pour sa célèbre toile La Balançoire (Musée d’Orsay, Paris) – et à la fin il y avait une parcelle de fruits et de légumes avec des buissons denses et des peupliers. » Il est difficile de savoir exactement quel coin du jardin est représenté dans ce tableau, bien que Nini semble être assise au bord d’une pelouse désordonnée. « Dans Nini dans le Jardin, qui doit dater d’environ 1875-76, le geste de Renoir est stimulé, nerveux, et expérimental. Il n’essaie pas d’unifier la surface de peinture de sa toile : des coins de mixtures riches se situent à côté de secteurs de sol à peine couvert. Sa couleur est néanmoins appliquée par des tapes et coups de touche variables, appropriées aux formes qu’ils décrivent. Ainsi, les buissons luxuriants dans le fond sont une mosaïque de verts, de marrons, et d’ocres ; le ciel au sommet laisse une série de coups bleus placés au dessus du vert – les emprunts les plus évidents de Renoir à Monet-. Nini elle-même est peinte plus énergiquement, le bleu violet de son chapeau côtoie les blocs les plus denses de couleur dans la composition. Le costume de Nini est très similaire, sinon identique, à celui qu’elle porte dans la Sortie du Conservatoire. La comparaison aide à établir la conception d’ensemble de Nini comme cela apparaît dans Nini dans le Jardin : la tunique sombre par-dessus une légère robe-tablier, avec jupon sombre, ce dernier élément étant juste visible à travers l’herbe et les plantes. Il est clair, cependant, que Renoir s’intéresse peu au costume ici. Son intérêt principal est d’enregistrer la lumière du soleil lorsqu’elle filtre à travers les buissons et les arbres vers  la petite Parisienne habillée à la mode. Il avait examiné déjà ces effets sur le nu ; Nini dans le Jardin marque une première étape dans un tel traitement des personnes habillées. De façon A titre d’essai, Renoir peint les reflets de feuillage sur le visage de Nini et les plus grandes ombres sur sa robe. Sa chevelure brun doré est surchargée des verts et des marrons du feuillage du fond ; les formes de sa robe se dissolvent dans la lumière tachetée et l’ombre.« Ces éléments du vocabulaire luministe de Renoir qui causeraient un tel scandale e 1877 — les ombres colorées, la tonalité violette des scènes extérieures — sont présentes dans ce premier exemple : par exemple, la ligne qui définit la joue et le menton de Nini, ainsi que les pièces mauve d’ombre sur sa robe. Bien que sa peinture en plein-air doit toujours beaucoup à Monet,… dans les tableaux qu’il a peints dans le jardin de la rue Cortot, Renoir a développé ce que Théodore Duret considérera être sa contribution la plus frappante à l’Impressionnisme : peindre une personne dans la lumière naturelle sans cesse changeante et mobile. L’exploration de Renoir de la lumière dansant par-dessus la figure humaine atteindra sa pleine expression dans La Balançoire et le Moulin de la Galette. Dans Nini dans le Jardin, de tels effets sont rendus de façon un petit peu hésitante, mais avec l’audace de l’expérience. .."

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